Au musée de Saint-Sauveur-en-Puisaye, le beau regard de Colette nous parle depuis la nuit de son temps, comme un passé qui nous questionne : qu’allez-vous faire de cette année qui commence ?
Parfois les mots nous manquent. Restent le regard, les images, les sourires, les saluts, les soupirs, les haussements d’épaule et puis les mots reviennent, précis, discrets, choisis.
Les mots auraient-ils manqué à Colette aussi, ou aurait-elle trouvé quoi dire aujourd’hui, elle qui traversa la grippe espagnole et deux guerres mondiales, mourut à l’orée de celle d’Algérie et passa la fin de sa vie immobilisée chez elle par l’arthrite et l’arthrose ?

Dans les années 1960, je suis allée plusieurs fois aux sports d’hiver avec mes parents et mes frères pendant les vacances de Noël.
Nous allions à Flumet, en Haute-Savoie, près du col des Aravis. La pratique des sports d’hiver commençait à se répandre et nous nous trouvions bien dans cette station de ski familiale, où les prix étaient plus bas et l’ambiance moins snob qu’à Megève toute proche.
Les skis étaient en bois et résine, longs et lourds, les chaussures en cuir pesaient aux pieds. Je me souviens du cliquetis de cet équipement (skis, bâtons et chaussures) sur l’asphalte de la route vers le téléski. J’appris le chasse-neige virage, figure indispensable pour se lancer sur les pistes vertes, avec un moniteur local. Les enfants descendaient en file lente et remontaient en canard les petites pentes des débutants, tout près de l’entrée du domaine skiable.

Ma fille est née au début des années 1980. Son père et moi lui avons donné un prénom d’épice et de sucre qui reflète la couleur ambrée de sa peau, alliage des deux nôtres. Un jour de printemps, elle avait à peine deux ans, je suis partie me promener avec elle au Forum des Halles. Un orchestre jouait un air de samba sur le parvis. Nous nous sommes assises à côté l’une de l’autre pour écouter les musiciens sur les marches d’un petit escalier, au milieu des spectateurs de ce concert improvisé.

Il y a plus de deux siècles, Xavier de Maistre, mis aux arrêts pendant quarante-deux jours dans la citadelle de Turin, écrivit « Voyage autour de ma chambre », son journal de reclus temporaire. Il trouva le moyen de s’évader en pensée, comme beaucoup d’entre nous pendant ces deux derniers mois, avec plus ou moins de bonheur selon les cas…

Il y a quelques années, ma mère fut hospitalisée dans l’annexe gériatrique d’un hôpital du Pays basque à la suite d’un accident vasculaire cérébral. Je venais souvent la voir depuis Paris.
Quand j’arrivais, l’accent des soignants, des visiteurs et des quelques patients qui parlaient encore m’enveloppait. À les écouter, je me sentais comme emmitouflée dans une couverture en laine des Pyrénées…

Ce soir, Huesca est tout près de Buenos Aires.

Le cercle des Aragonais fête la  San Lorenzo. Descendants d’Aragonais émigrés en Argentine, ils parlent des rues des villages de leurs antepasados comme s’ils y avaient grandi et échangent des nouvelles du pays.
Sur les tables, des pots de basilic, la plante de Huesca,  sur scène des jotas chantées et dansées.

Échame madre, échame un ramico de albahaca
De esta maceta que tienes en el balcón
Fresca como el roció, albahaca perfumada,
Un beso que Huesca y tú me dais con amor.

Lance ma mère, lance-moi une branche de basilic
De ce pot sur ton balcon
Frais comme la rosée, basilic parfumé
Huesca et toi, un baiser de votre amour.

L’émigration c’est ça : on aime toujours quelque chose d’ailleurs, on est d’ici et de là-bas.
Si les liens entre l’Europe et l’Amérique se matérialisaient au-dessus de l’océan, cela ferait un immense voile d’une rive à l’autre, tissé de fils impalpables et mouvants  qui laissent passer la lumière et se reflètent sur les flots.





Au bout du chemin, Ignacio apercevait le clocher de l’église et le toit des maisons de son village au creux du vallon. À l’époque où il y vivait avec sa famille, les rues étaient encaissées, les maisons serrées les unes contre les autres. De hautes cheminées cylindriques (tronconiques) dominaient les toits comme dans tout le […]

Le col de Pau est à presque 2 000 m d’altitude. C’est un passage du Béarn à l’Aragon, et aussi vers Saint-Jacques-de-Compostelle, pas le plus fréquenté car il y en a de plus faciles.