Un matin d’hiver, vers le métro… Monde d’aujourd’hui, monde de demain ?
Billets vie quotidienne
Ligne 8 Daumesnil, direction Balard, mercredi 29 juin 23 h
Trois jeunes de pas trente ans sur le quai. L’une dit à sa copine :
Photo Archives Alejandro Yofre Copito, el periódico.com
Il y avait au zoo de Barcelone un gorille albinos qui s’appelait Copito de nieve, Petit flocon de neige. C’était le seul gorille albinos connu au monde. Il est mort en 2003, à l’âge de 40 ans et a été incinéré dans une urne biodégradable, avec de la tourbe et une graine d’arbre, pour le cycle de la vie se poursuive.
Et ça a marché car il est revenu dans le métro parisien, dix ans après, dans les bras de deux jeunes filles.
Un soir de mars 2013, Paris, place de la Nation, tout près des colonnes du Trône. C’est l’heure où les SDF cherchent à se nicher dans les coins pour dormir. Il fait encore froid, c’est le début du printemps pourtant. Bizarre sur ce banc, ce gros paquet vibrant recouvert d’une bâche de plastique bleue. A côté, des baluchons de plastique.
Quelqu’un tremble-t-il de froid là-dedans ?
Le paquet frémit à nouveau, spasmodique, dans sa partie la plus bombée. Et je comprends. Là, à deux pas d’un café et d’une bouche de métro, dans cette nuit froide de mars, deux miséreux baisent en silence sous une bâche.
Amants transis des colonnes du Trône, mon cœur se serre avec le vôtre dans la nuit sombre de Paris, chambre d’hôtel plastifiée de la moitié d’un mètre carré, misère bleue crissante et froide.
Maryse Esterle